Portraits d’ambassadeurs

Ecloz, la deuxième chance prend racine au cœur de Pau

Une entreprise pas
comme les autres :
accueillir sans sélectionner

Dans l’effervescence du centre-ville palois, un lieu singulier vibre au rythme d’un projet profondément humain. Ecloz, entreprise à but d’emploi (EBE), incarne l’expérimentation « Territoires Zéro Chômeur de Longue Durée ». Ici, pas de CV exigé ni de sélection à l’entrée. Ceux qui poussent la porte sont plutôt invités à parler d’eux : ce qu’ils savent faire, ce qu’ils aimeraient faire, ce qu’ils ne veulent plus faire, et ce qu’ils sont prêts à apprendre.

Portée par une équipe passionnée et soutenue par la communauté d’agglomération de Pau, Ecloz redonne une place à celles et ceux que le monde du travail a trop longtemps oubliés. La seule condition ? Habiter le quartier depuis six mois et être privé d’emploi depuis au moins un an. Le reste, c’est une affaire de volonté et de confiance.

© Enzo Laureyssens

Une vision radicalement
humaine de l’emploi

Derrière ce projet, un homme à l’écoute, Léopold Oliva est engagé. Passé du monde de l’industrie à celui de l’insertion, cet ex-ingénieur est devenu bâtisseur de liens. Ce virage professionnel s’est opéré à la suite d’un bouleversement personnel et spirituel. « Je ne pouvais plus rester sans rien faire », confie-t-il avec une sincérité désarmante. À la Croix-Rouge, puis au Secours Catholique, il découvre l’ampleur de l’exclusion. Avec Ecloz, il décide d’agir.

La méthode est simple et profondément subversive dans une économie du rendement : accueillir sans exclure, créer à partir des personnes présentes et construire des emplois à la mesure des **talents, des contraintes et des rêves de chacun. Un véritable pari sur l’humain. « C’est un peu comme la permaculture : on ne décide pas de tout planter en maïs. On regarde ce qui pousse déjà ici, et on fait avec. »

©Studio Panache

Artisanat, recyclage, création : des métiers réinventés

Ecloz ne se contente pas de proposer un travail, l’équipe imagine sans cesse des activités utiles et durables. Sur place, une recyclerie côtoie un atelier bois, un espace couture, un service de « Vélo-services », des prestations aux entreprises, ou encore des projets créatifs inattendus, comme la construction d’un ours mécanique en bois low-tech, actionné par un vélo.

À travers ces multiples facettes, c’est tout un écosystème local qui se remet en mouvement : meubles relookés, textiles brodés à la main, cravates devenues bijoux ou sacs, matériel mutualisé entre particuliers… Chaque objet porte la trace d’un parcours, d’une seconde vie, d’une dignité retrouvée.

Et derrière les ateliers, ce sont 57 personnes, de toutes origines et de tous âges, qui partagent bien plus qu’un emploi : une aventure collective, des sourires, des échecs, des réussites, des amitiés inattendues. « On est très différents, mais ici, on est tous collègues ».

Une utopie concrète
et exigeante

Mais Ecloz, ce n’est pas tous les jours un long fleuve tranquille. La réalité est parfois rugueuse, les équilibres fragiles. Il faut produire, former, accompagner, faire cohabiter des parcours cabossés. L’enjeu économique est important : augmenter le chiffre d’affaires, tout en conservant une logique sociale et une mixité d’activités.

Des marchés publics, des composteurs pour la Corse, du démantèlement d’huisseries à Lons, un pôle couture qui prend de l’ampleur… autant de leviers pour garantir la pérennité du modèle. Car l’objectif est clair : démontrer qu’un emploi adapté et choisi peut transformer une vie, une rue, un quartier tout entier.

Photo d’introduction : © Enzo Laureyssens