Portrait d’ambassadeur :
La carte blanche de Michel Feltin-Palas
Rédacteur en chef à L’Express, spécialiste des régions françaises, Michel Feltin-Palas est un ambassadeur du Béarn engagé ancré en Vallée d’Ossau. Le réseau des ambassadeurs du Béarn a décidé de lui offrir une carte blanche pour exprimer pleinement son attachement à notre territoire.
« Je ne suis qu’à moitié Béarnais, mon père était Parisien et j’ai grandi en Ile-de-France. Ma mère en revanche était Béarnaise, Ossaloise plus précisément, et portait le nom de Palas. Mon vrai patronyme est donc Feltin, tout court. J’ai décidé d’ajouter le nom de ma mère, il y a une dizaine d’années, par amour pour ma patrie de coeur.» L’attachement de Michel Feltin-Palas à ses racines n’est plus à démontrer. Toujours enclin à défendre une langue, fût-elle modeste, à mettre en valeur les qualités et les traditions du Béarn, à participer à la valorisation de son territoire. « Jeune, je passais 3 à 4 mois chaque année dans la ferme familiale et je me suis rendu compte bien plus tard de la valeur de ces racines. La Vallée d’Ossau passe pour le conservatoire de la culture béarnaise traditionnelle et j’y suis particulièrement sensible. »
Assouste, le petit village de son enfance, situé au fond de la vallée, où est née et a grandi sa mère, est aujourd’hui encore composé d’une douzaine de maisons. Il semble que rien ou presque n’y ait bougé. Michel s’est imprégné de cette culture naturellement. « La culture paysanne y était restée bien vivace et ma famille vivait en respectant des traditions très anciennes. Mon grand-père portait le béret, ma grand-mère les cotillons : un costume avec un capulet noir traditionnel. Tout le monde parlait béarnais. Comme dans les familles traditionnelles de cette époque, le fils ainé héritait. Mon oncle berger était célibataire et ne s’est pas marié car il était transhumant : il passait l’été en montagne, sur le plateau du Soussoueou, et l’hiver en plaine, en Gironde, dans les Landes ou le Gers. Il s’y rendait à pied avec son troupeau. Il fabriquait son fromage.». A 14 ans, il effectue sa première transhumance avec un autre de ses oncles, berger à Bélesten. « Cela a été un choc ! Marcher plusieurs heures en pleine nuit, arriver à 7 heures du matin sur le plateau de Bious, entouré de dizaines de troupeaux de vaches, de brebis, de juments. J’ai été bouleversé ! J’ai même voulu devenir berger à ce moment-là. Ma mère m’a conseillé de poursuivre des études et je l’en remercie, d’une certaine manière. J’idéalisais ce métier sans vraiment le connaître : la désillusion aurait peut-être été au bout du chemin. »
Michel grandit, partageant son temps entre la région parisienne, le temps de l’école, et la vallée d’Ossau, le temps des vacances. « J’étais plongé dans ce monde particulier sans prendre conscience de ce qu’il représentait. Tout me semblait très naturel : je vivais avec mon oncle, nous faisions les foins, la maison avait pour tout chauffage une seule cheminée, nous nous occupions du bétail. Moi, j’étais très heureux / c’était un tel contraste avec la Seine-Saint-Denis ! Il y avait là des senteurs, des paysages, une culture autre. Et j’avais la chance d’évoluer au sein d’une famille très unie, dotée de valeurs fortes, respectueuse du travail comme des anciens, très ancrée dans son territoire et dans sa culture. Cela m’a construit pour la vie. » Ses cousins, oncles et neveux de la branche maternelle, à qui il voue une admiration sans bornes, portent en eux « une culture minoritaire, voire minorisée, une culture fragile qui mérite de vivre et doit être défendue avec d’autant plus de force qu’elle est menacée de disparition. » L’engagement de Michel vient peut-être de là : une culture et une langue à défendre, un territoire à valoriser. « Pour moi qui vivais dans l’anonymat de la grande ville, j’avais la chance de bénéficier ici d’un ancrage très fort. Cela s’est révélé très structurant pour moi. »
Aujourd’hui, il regrette parfois son manque de disponibilité pour venir sur ses terres ancestrales. « Je me suis marié, j’ai eu des enfants, un travail très prenant et j’ai moins de temps qu’avant, mais j’essaye de venir quand je peux ». Il regrette également de ne pas avoir appris le béarnais enfant. « Ma famille parlait la langue naturellement, mais communiquait avec moi en français. Ce n’est qu’à la mort de ma mère que j’ai commencé à apprendre la langue. Je prends des cours, je lis des livres, je progresse petit à petit. J’ose même aujourd’hui parler en famille, grâce à son soutien et à sa bienveillance. Je sais bien que je ne saurais jamais la parler aussi bien qu’un locuteur naturel, mais je m’accroche ! »
A Paris, Michel appartient à un groupe d’Ossalois : Lous Arricouquets (les cabrioles) avec qui il chante en polyphonie. « Nous nous réunissons une ou deux fois par mois, c’est pour nous une manière d’être dans la Vallée d’Ossau tout en vivant à Paris. » Le 21 juin, ils se retrouvent tous Place des Vosges pour une cantère. « La place des Vosges a été conçue par Henri IV, elle est donc un peu la nôtre ! Nous la prêtons le reste de l’année aux Parisiens, mais ce jour-là, elle est à nous », glisse-t-il avec un sourire.
Quoi que Michel entreprenne, où qu’il soit, son territoire et la défense de ses valeurs ne sont jamais loin. « Professionnellement, je suis journaliste à l’Express depuis une vingtaine d’années et je me suis toujours occupé des régions. Depuis 2 ans, j’ai lancé une lettre d’information qui s’appelle « sur le bout des langues », dont le parti pris est la défense de la diversité linguistique. Le principe est simple : je défends toujours la langue faible contre la langue forte. Le français contre l’anglais à l’international ; les langues régionales contre le français en France. »
Il est viscéralement attaché à sa région et son rôle d’ambassadeur lui tient très à coeur. « Le Béarn fait partie des territoires qui ont le plus de caractère et d’identité. Mais qui ne se valorise pas assez ». A nous donc, de promouvoir sa belle énergie, ses personnalités, la noblesse de sa culture et de ses traditions.